21.12.10

La parenté de lait dans le monde musulman

Edina FÖLDESSY
 
Idéologie masculine et pratique féminine 
de la parenté de lait dans le monde musulman 
arabo-berbère.
24 p.  

Dans le monde musulman arabo-berbère, une relation de parenté, similaire dans plusieurs de ses aspects à un lien de consanguinité, dont les prohibitions matrimoniales sont les principales, s’établit par la transmission du lait maternel. Une approche structuraliste entreprise pour trouver la cohérence des interdits par le sang et par le lait, le concept de l’inceste dans l’Islam révèle le rôle des hommes et du sperme dans la production du lait maternel. Ce concept reflétant essentiellement une idéologie masculine est basé sur la transmission de la substance de l’homme, voir l’identité agnatique. En même temps cette faculté biologique semble être régie par l’Islam en matière de religion et de statut social.

Dans la vie quotidienne, la relation par le lait peut être le produit d’un acte qui s’impose dans une situation de crise, visant à écarter un danger de mort d’un enfant, privé accidentellement du lait de sa mère. En même temps, la parenté de lait, du fait qu’elle comporte des traits consanguins tels que prohibitions matrimoniales, solidarité et intimité entre les parents, peut être également établie afin de créer justement ces traits. Ainsi, par un allaitement réel ou même simulé, sans transmission effective du lait maternel, on peut changer intentionnellement la nature des relations, aussi bien dans des positions verticales que horizontales de la parenté, entre deux individus, entre individu et groupe ou entre deux groupes, tout en jouant sur l’une ou l’autre des deux facettes de la parenté: sur la distance par l’établissement d’une prohibition matrimoniale ou au contraire, sur le rapprochement par la création d’une relation de complicité, de fraternité ou de protection.

L’intérêt qui est porté aujourd’hui sur ce sujet se cristallise autour de quelques questions fondamentales: la position structurale de la parenté de lait au sein de la parenté réelle, avant et après l’Islam; les impacts du changement de modalités d’adoption dans l’Islam par rapport aux temps pré-islamiques; la cohérence structurale des prohibitions matrimoniales introduites par le sang et par le lait. Pour l’étude de ces questions, les chercheurs ont essentiellement recours aux textes juridiques des différentes écoles islamiques ainsi qu’à des quelques auteurs considérés comme classiques. En même temps, peu d’intérêt a été porté à l’égard des recherches sur le terrain, sur les pratiques de ce type de parenté et sur ses représentations symboliques. C’est dans ce domaine que nous voudrions apporter quelques éléments nouveaux issus de nos expériences dans une communauté en Algérie, chez les Mozabites. (L'auteur).


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